jeudi 20 mai 2010

Matthieu, 16 ans Jeune Pop' écervelé.

Récemment, j’ai fait la découverte de ceci. Officiellement, il s’agit d’un blog d’un jeune de 16 ans membre des Jeunes Pop’. Jusqu’ici, rien d’anormal. Je m’attendais évidemment à ne pas être d’accord avec l’immense majorité des billets pouvant s’y trouver, naturellement. Mais quelle ne fut pas ma surprise d’y trouver une prose à ce point caricaturale qu’aujourd’hui encore je doute de la sincérité de celui qui tient ce blog. Qu’on se comprenne bien, il ne s’agit pas de propos « caricaturaux » au sens où des gens comme Jean-François Coppé ou Fredo et Dodo peuvent les tenir. Ces clowns là font de la mauvaise foi, ils savent qu’ils font de la mauvaise foi, qu’ils sont dans l’excès, que c’est un effet recherché etc. Leurs propos excessifs sont la plupart du temps maitrisés. Non, là, il s’agit d’une caricature telle qu’un humoriste ou un caricaturiste pourrait en être à l’origine. Les excès sont réellement des excès. Pire, ils sont appuyés, ils reprennent de vieux clichés, racistes, homophobes, antisémites etc. Quelqu’un voudrait caricaturer un discours de droite ou d’extrême droite qu’il ne s’y prendrait guère autrement. Encore une fois, j’insiste, ce n’est pas moi qui serais facilement impressionnable ou sous le choc de propos de la sorte : lorsque je tombe de temps en temps sur des sites ou des blogs de droite ou d’extrême droite, je ne suis « choqué » que par le fond, les idées en elles-mêmes, non par la façon dont elles sont présentées et argumentées. Par exemple, un site d’extrême droite va faire passer sa xénophobie en exhibant des statistiques sorties d’on ne sait où pour montrer que décidément, les jeunes immigrés, ils foutent le bordel que le autres. Mais il sera finalement rare de trouver dans ces sites, de façon explicite, l’idée que TOUS les immigrés foutent TOUS le bordel. Il ne s’agit pas ici de défendre l’extrême droite ou quoique ce soit dans ce genre (car au font cette idée, même si elle n’est pas affirmée expressément, est fondamentale dans la pensée xénophobe) mais de montrer que l’argumentaire est établi de façon à paraitre un tant soit peu crédible. Chez notre ami, non. Point. Généralités, clichés, admiration sans borne pour Sarko etc. Aucune retenue. Ce n’est plus de la « décomplexion » à ce stade, c’est être incapable de différencier ce que l’on pense «schématiquement » et ce que l’on doit dire pour être crédible.
A titre personnel, je suis convaincu que ce blog est bien tenu par quelqu’un de réel qui pense et s’exprime sincèrement et exactement comme il le fait dans ses articles. Pourtant, je ne peux m’empêcher d’en douter à leur lecture et à celle de ses commentaires. Ce qui est intéressant ici, ce n’est pas tant que l’on puisse affirmer explicitement de telles choses (il suffit pour ça de ne pas être très cultivé ou pas très malin) mais de voir comment il peut exister des choses si absurdes qu’il devient impossible d’être tout à fait certain qu’il s’agit bien de choses réelles. C’est une expérience assez troublante que de se dire que l’absurdité que nous avons sous les yeux EST une absurdité. En théorie, les absurdités n’existent pas, justement parce qu’elles sont absurdes. A la rigueur, il s’agit de second degré, mais dans un tel cas, on peut effectivement penser que ce n’est pas l’absurdité elle-même qui existe, c’est son illustration, sa dénotation.
L’interrogation est ici « ontologique » : qu’est-ce qui fait la différence entre une caricature et une chose caricaturale comme le blog de Matthieu, 16 ans, jeune pop‘ écervelé ? Pour cela, il faut savoir ce qu’est une caricature. On pourrait proposer qu’une caricature est une opération consistant à « simplifier » une réalité (une personne, une situation, un propos) en lui autorisant un nombre extrêmement réduit de ses prédicats, de ses caractéristiques par suppression de tous les autres. Par exemple, la caricature du sportif est celle qui attribue à l’individu (le sportif) l’unique prédicat relatif à son sport (taper dans un ballon pour un footballeur, nager pour un nageur…). L’individu sportif n’a plus qu’un seul prédicat, qu’une seule caractéristique : celle définissant son activité. On pourrait presque dire que le sportif est réduit à son sport, l’individu à son activité. La caricature d’une personne consiste donc à réduire cette personne à ce qu’elle « est » ou plutôt à la façon dont on la dénote. Ainsi la caricature politique consiste à réduire le discours ou l’individu politique (de droite ou de gauche) à un ensemble de propositions simples et réduites (de droite ou de gauche) qui, parce qu’elles sont trop étroites et trop peu nombreuses, nient une partie de la réalité et deviennent alors absurdes en entrainant des paradoxes ou des situations impossibles. C’est de l’absurdité qui découle de cette réduction du complexe au simple que vient l’effet comique. Une des caractéristiques de la caricature est qu’on ne peut pas la caricaturer. En effet, puisqu’il s’agit déjà d’une chose « simple », on ne peut plus la réduire encore. Une autre en est qu’une caricature n’est pas réelle puisqu’elle consiste toujours à ôter au réel un ensemble de faits, de nuances, de prédicats, à abstraire l’objet à caricaturer tout ce qui fait qu’il est au monde (une histoire, un contexte, des liens et des rapports avec d’autres objets etc.). Caricaturer, c’est abstraire, arracher par l’esprit, un objet du monde concret et lui dénier un nombre considérable de ses caractéristiques afin de le simplifier au maximum pour produire les paradoxes et absurdités comiques. La caricature est donc une Idée-de-quelque-chose et n’existe donc pas en tant que telle.
Mais revenons à notre Matthieu. Si nous croyons qu’il existe réellement, nous ne pouvons pas lui attribuer sincèrement la caricature comme prédicat. Qu’est-ce à dire alors que d’affirmer que ce blog « est une caricature » ? Tout simplement qu’il est l’expression des idées de droite prises unilatéralement et l’une après l’autre, comme un caricaturiste ferait pour caricaturer plusieurs foi et à chaque fois sous un autre angle un ensemble complexe. Car n’oublions pas que si le footballeur n’est pas qu’une chose qui tape dans un ballon, c’en est aussi une. Le prédicat exacerbé et isolé dans la caricature n’est certes pas suffisant pour définir réellement l’objet caricaturé mais il reste un prédicat nécessaire. Inversement, il est possible de caricaturer un objet de diverses façon, d’autant de manière qu’il a de prédicat (par exemple, on pourrait également caricaturer le footballeur via son gout pour ses paies astronomiques, son langage souvent limité etc.). Autrement dit, la caricature déforme la réalité mais n’est pas un mensonge total. Une bonne caricature, pour fonctionner, doit dire quelque chose de vrai en partie. Ce que Matthieu nous présente donc à travers son blog, ce n’est pas « la droite » ou l’idéologie de droite réelle (à son grand regret me semble-t-il) mais les prédicats, les caractéristiques, les éléments, bref des parties toutes nécessaires mais jamais suffisantes qui font cette idéologie. Ces parties disent bien quelque chose en tant qu’elles sont les éléments constitutifs de l’idéologie libérale. Bien qu’ils soient déformés, il nous est alors possible de constater l’immense absurdité non pas seulement des propos caricaturaux du jeune Matthieu, 16 ans, Jeune Pop’ écervelé mais de l’idéologie, via ces éléments, qu’il entend défendre malgré sa maladresse qui ne peut que desservir un peu plus sa cause.

Et là dessus, y’a pas photo…

mercredi 19 mai 2010

Qu'est-ce que la Philosophie de Combat Contre le Capitalisme ?

Toute pensée politique est sous-tendue par des postulats et des positions philosophiques. Cependant, ces dernières ne sont pas toujours (voire ne sont jamais) explicites ou explicitées. De la sorte, les porteurs des idéologies sont le plus souvent ignorants de leurs propres options philosophiques. Mais parce que fondamentales, elles réapparaissent, émergent régulièrement des discours et des idées politiques.

La philosophie de combat a un double objectif. Premièrement, elle tente de révéler, de dévoiler les options philosophiques présentent dans les diverses positions politiques. Cette stratégie du dévoilement permet de constituer une nouvelle base de contestation, un nouveau plan de dispute. Et puisque la plupart des gens ignorent leurs propres fondations, ils sont incapables, le plus souvent de les défendre. Ce plan étant à la fois ce qui sous-tend tout le discours politique et celui qui est le moins défendu, il est donc le plan le plus facile pour détruire une idéologie politique. En délaissant le terrain philosophique, les politiques abandonnent un champ de bataille. La philosophie de combat prétend y revenir mieux armée que jamais grâce à une méthodologie moins spéculative et plus scientifique que la philosophie traditionnelle. En effet, en axant la réflexion philosophique non plus seulement sur des objets abstraits et idéaux mais aussi sur des objets concrets et empiriques, la philosophie de combat, philosophie sociale, prétend être à la fois le point de départ et le point de synthèse de multiples sciences sociales (sociologie, économie…). Dès lors, son discours puissant et solidement argumenté est en mesure de détruire aisément les faibles résistances que les politiques pourraient avancer sur un champ qu’ils ont depuis longtemps délaissé.

La philosophie de combat est ici dirigée contre le capitalisme. Elle s’attaquera donc aux postulats des doctrines philosophiques que la bourgeoisie a oubliés, lui préférant un discours superficiel et reposant sur « l’évidence » de ses mêmes postulats. Elle les attaquera certes, mais surtout, elle n’aura de cesse de les mettre à jour, de les expliciter, de les expliquer, bref, de les dévoiler afin que l’on puisse assez les analyser, première étape pour une critique efficace.

Le second objectif sera de donner les outils nécessaires pour réaliser la critique de ces postulats. Si nous n’hésiterons pas à les prendre directement pour cible, nous souhaitons également que cette capacité de critique philosophique soit partagée et diffusée entre et par tous ceux qui souhaitent et qui œuvrent d’une quelconque manière contre le capitalisme. Pour cela, il nous faudra vulgariser et expliquer des concepts et des positions philosophiques qui permettent une telle critique mais également qui permettent de construire une alternative. Mieux, afin que notre stratégie ne se retourne pas contre nous, afin que nous soyons en mesure de répondre philosophiquement aux attaques philosophiques portées sur nos propres positions, il nous faudra aussi expliciter et expliquer quelles sont nos propres fondations. En ayant conscience et connaissance de nos fondements, nous aurons alors un avantage non négligeable puisque nous serons :

1. En mesure de nous défendre,

2. En capacité de proposer des alternatives philosophiques donc politiques au capitalisme

3. D’une puissance bien supérieure à celle du camp adverse.

En résumé donc, la philosophie de combat contre le capitalisme se présente comme l’occasion d’ouvrir une nouvelle brèche dans le débat politique, ou plutôt d’en réactualiser une. Mais puisque, sur un terrain vierge ou abandonné, l’avantage est laissé à ceux qui arrivent les premiers (laissant ainsi le temps à ceux-ci de préparer aussi bien leurs attaques que leurs défense), nous pensons tenir là une manière particulièrement efficace de s’opposer à la doctrine capitalisme, quelque soit les formes qu’elle puisse prendre.

Nous avons un avantage énorme, profitons-en !